Pourquoi lire ses livres en 2023? Parce que ses idées sont toujours utiles pour comprendre notre monde. Parce que fondamentalement, il était avant tout un grand humaniste, un prophète qui nous explique ce qui s’en vient. Il était TOURNÉ VERS L’AVENIR.
Les citoyens de Saint-Hippolyte et de Saint-Jérôme sont bien chanceux d’avoir eu des grands serviteurs comme le curé Labelle, les chanoines Lionel Groulx et Jacques Grand’Maison. Selon ce dernier, il faut avoir la foi en nous comme peuple, espérer des jours meilleurs et être charitables avec les humains. Si vous vous rappelez, ce sont les trois vertus théologales du Petit Catéchisme de notre enfance.
Le passé, le présent et l’avenir
La chanson la plus populaire en 2022 selon le Journal de Montréal, Dégénération de Mes Aïeux, résume bien ses idées : le passé, le présent et l’avenir.
- Le petit gars : ses grands-pères ont défriché, labouré, rentabilisé la terre, son père l’a vendue pour acheter des REER. Pis toi, t’es locataire d’un p’tit trois et demi, fret en hiver.
- La fille : tes grands-mères ont eu quatorze enfants, toi t’es un accident et tu avortes souvent, mais la nuit tu rêves d’une tablée pleine d’enfants.
- Les ancêtres n’étaient pas tous des imbéciles. Ils avaient le sens de la fête, éteins ta télé, faut pas rester encabané.
De quoi sera fait l’avenir?
Récemment, à la radio de Radio-Canada, le premier ministre Legault a avoué que son livre de chevet était Quand le jugement fout le camp. Michel David, chroniqueur au Devoir, écrit que le père Lévesque, qui a créé l’École de travail social à l’U. Laval, Mgr Parent, ministère de l’Éducation et Jacques Grand’Maison sont trois membres de l’église catholique qui ont beaucoup fait pour le Québec. Lire ses livres est une voie royale vers le bonheur, ils nous aident à être heureux pour moins cher qu’un thérapeute.
Ce qu’il préconisait
La liste de ses idées est longue. Permettez-moi d’en mentionner quelques-unes, toutes tirées de ses livres :
- L’importance de notre belle histoire nationale et de nos ancêtres. Selon lui, « un peuple sans passé est un peuple sans avenir ».
- La transmission intergénérationnelle de belles valeurs par les ainés.
- La parentalité, lutte au suicide individuel et la dénatalité, suicide collectif.
- Il insiste pour Réenchanter la vie pour se donner de l’espoir et combattre l’hyperanxiété.
- La religion. « Si bien qu’aux yeux de Dieu, ce n’est plus d’abord la religion qui démarque les êtres, mais leur humanité et leur inhumanité ».
- Il écrit que pour lui, « Il n’y a qu’un seul grand péché, humilier l’autre ».
- Il reconnait l’importance de la laïcité, tout en faisant remarquer que, paradoxalement, la laïcité et la démocratie n’apparaissent que dans les pays de culture chrétienne, et non dans les pays musulmans, islamistes et théocratiques.
- Le nationalisme. Après avoir été élu en 1976, René Lévesque lui a offert le poste de ministre de l’Éducation et en 1980, il a été invité à se présenter comme candidat du PQ dans Saint-Jérôme.
- Le droit des femmes à contrôler leur corps, à la maternité, à devenir prêtre et à jouer un rôle public. Il a dit « regretter ne pas avoir pas eu d’enfants ».
- Aider les Tiers (vieille expression de la Révolution française), les pauvres, les non-syndiqués, les travailleurs temporaires.
Ce qu’il dénonçait
Le contraire de ses idées, pour mieux le comprendre : essentiellement la démesure, l’abandon du Gros Bon Sens.
- L’école « enfirouapée », l’enfant-roi et l’importance de ses émotions.
- L’enseignement de l’histoire au Québec : « Malheureusement supprimé dans les écoles durant plusieurs années. »
- Les utopies de la table rase, surtout en éducation.
- Les clauses de disparité de traitement et les syndicats corporatistes.
- La sexualité et l’affectivité condamnées par la vie monastique.
- La pop-psycho qui envahit nos médias, différente de la psychologie comme science.
Un prophète qui marche seul
Ses collègues théologiens le considéraient comme un prophète, un visionnaire, « qui marche seul ». Son testament se résume à une phrase qu’il disait souvent : « Quand on quitte cette terre, il ne reste que ce que l’on a donné ».
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Ce texte a été lu le 26 avril dernier, lors de la soirée Jacques Grand’Maison pour le lancement de la chaire de l’UdM qui porte son nom. Pour pérenniser son œuvre, et ses idées toujours pertinentes, pour voir le futur, une chaire est créée pour aider de jeunes étudiants à obtenir des bourses de maitrise et de doctorat. Gilles Ducharme a organisé la cérémonie de collecte de fonds.
Je suis un peu ému, de parler de Jacques Grand’Maison, que je regrette et qui m’a beaucoup appris et aussi de me retrouver, 50 ans plus tard, membre du Comité des amis de Jacques Grand’Maison avec Paul-André Boucher avec qui j’ai vécu l’aventure de la Librairie communautaire dans Tricofil en 1975. Je suis en train de devenir un Jérômien de souche…
En 2008, Jacques Grand’Maison m’a téléphoné chez moi. J’ai commencé à enseigner au Cégep de Saint-Jérôme en 1972, comme professeur de philosophie. Pendant la plus grande partie de ma carrière, j’ai résumé, présenté et fait lire à mes étudiants les grands textes de Platon, Aristote, Descartes, Rousseau, Marx, Charles Taylor, etc. Je lisais ses livres, mais je ne savais pas qu’il me connaissait. Nous avons entretenu des échanges réguliers, de 2008 à 2016.
En 2014, lors d’une rencontre, je constate qu’il était déçu. Son médecin lui interdisait de conduire son automobile. Il ne pouvait se rendre à un congrès de la faculté de droit de l’U de Sherbrooke, prononcer la conférence principale. Je lui ai offert de le conduire. Il accepta. Nous passâmes trois belles journées ensemble à discuter. Nous fûmes reçus comme des rois.