Renée Noreau, artiste peintre, a, au fil des ans, apprivoisé le silence. « J’ai appris à écouter et à me taire. Car c’est dans le silence qu’on entre en contact avec des âmes. » En témoigne son exposition, L’écho des silences, présentée à la salle multifonctionnelle de la bibliothèque.
Renée Noreau a commencé à peindre en 1989. Pendant plus d’une décennie, elle a utilisé l’huile pour représenter, surtout, des paysages. C’est en 2002 qu’elle commence à s’intéresser à une peinture plus libre, à l’acrylique et aux techniques mixtes. Elle n’aime pas les étiquettes mais admet que sa peinture peut être décrite comme de l’expressionnisme abstrait.
« Dans le silence, j’ai mélangé les couleurs. J’en ai plein les doigts.» (anonyme)
Renée Noreau expose des toiles peintes en 2013-2014 et aussi des toiles peintes en 2017. Dans les plus anciennes, sa voix s’élève haut et fort en couleurs vives. Pour cela, elle sait avec doigté recourir au disque chromatique. « Oui, dit-elle, la complémentarité de couleurs est un outil pour moi, au même titre que les pinceaux, les spatules ou les brosses. » Et elle crée ses propres coloris. « Si j’utilise, par exemple, un jaune, je mélange sur ma palette différents types de jaune pour qu’on ne retrouve pas sur ma toile des couleurs commerciales standard. »
« Un temps pour garder le silence et un temps pour élever la voix » (R. Bradbury)
Ses derniers tableaux sont plus sobres, plus épurés. Autour ou à travers des couleurs toujours aussi intenses, elle propose des plages de peinture aux teintes calmes et fusionnées qui « occupent la toile de façon différente, autant par leur forme que par leur fond, déclare l’artiste. C’est ce silence qui donne de la force à ma parole, qui donne de la force au reste de mes toiles. »
« Je portais le poids de ce silence et il étoffait mes épaules » (P.Grimbert)
Il y a bien un toile figurative dans cette exposition. Elle s’intitule Entre deux soleils. « J’ai voulu reproduire une photo que j’avais prise au petit matin. Elle représentait parfaitement le thème de l’exposition, l’écho des silences. » Renée Noreau explique s’être imposé à elle-même la mission de compléter cette toile qu’elle a eu beaucoup de difficulté à peindre car cela exigeait de l’obéissance. Mais elle tenait à aller au bout de ce désir irrépressible de partager une vision inspirante.
« C’est la métamorphose. Un matin on se lève et on comprend que dans le silence et la discrétion, on est devenu quelqu’un d’autre.» (V. Despentes)
Habituellement, elle trouve l’inspiration dans sa vie intérieure. Et les tonalités guident et nourrissent sa création. « Avant de commencer à peindre, je regarde les couleurs et je choisis celles qui m’allument ce jour-là, j’imagine les harmonies que je peux en faire. La peinture s’impose. Je ne sais pas ce que ça signifie sur le coup mais, après, ça revêt un sens. Lorsque je me sens bloquée, je prends du recul: je regarde une seule partie de la toile ou je la retourne… Bien qu’exaspérants, ces culs-de-sac, sont des opportunités extraordinaires. Ma production récente exprime une lente transformation, en harmonie avec ce que je deviens … et que je ne saurais dire avec les mots! »
1 Ivan Jablonka