Entrepreneur hippolytois qui a façonné le ski nautique québécois et canadien
«Le lac l’Achigan a été dans les années 1960 et 1970 un lieu très important de ski nautique, affirme Pierre Beaudin, digne citoyen hippolytois de 94 ans. Et, je pense que c’est à cause de moi, lance-t-il avec fierté dans un grand éclat de rire.»
Devant sa grande fenêtre ouverte sur ce lac l’Achigan, les couchers de soleil flamboyant lui rappellent ces 40 années consacrées à la recherche et à la fabrication de matériel en ski nautique dans son entreprise Sea Gliders. Mes skis et mes équipements sportifs ont été expérimentés et fièrement portés par les membres des équipes canadiennes de ski nautique durant plus de 10 ans. Ils sont devenus pour l’ensemble des skieurs et des plaisanciers québécois, canadiens et même mondiaux les produits les plus appréciés dans ce sport naissant sur la planète.
Fabricant de skis bananes
Pierre Beaudin, catalogues ouverts devant lui, raconte l’aventure de ses produits. Dès sa jeunesse, comme skieur aguerri et, par la suite, vendeur d’équipement sportif, il était peu satisfait du matériel sportif disponible dans les boutiques et n’hésitait pas à les transformer pour les améliorer. Les skis nautiques des marques Dolphin, Akwa-Skees qui venaient d’Europe depuis 1920, étaient faits de bois francs lourds, grands et pointus pour fendre les vagues comme les skis de fond dont ils sont une adaptation. Mais sur l’eau, ils étaient peu stables et difficilement maniables. Pierre Beaudin bricole plutôt dans le garage de son père, dès 1957, des skis en frêne, plus léger et flexible sous le poids du skieur et leur ajoute en-dessous, des rayures ou une petite quille pour la stabilité. De plus, après plusieurs expérimentations, il en arrondit le devant et les coupe à la hauteur de chaque skieur. Ainsi, à l’exemple du fond plat relevé des chaloupes, dites verchères, cela permet un meilleur maintien au-dessus de l’eau et favorise, une plus grande glisse au-dessus des vagues. Rapidement, les skieurs les adoptent et les baptisent du surnom de banane, dû à la couleur jaune que le verni du frêne fait ressortir. Pierre Beaudin innove aussi dans le monde des fixations en les bricolant dans un matériau nouveau : le caoutchouc. Plus souples et plus maniables en cas de chute, elles remplacent celles de métal, lourdes et rigides, de marque Skitechnic ou Skitec.
Les clubs sportifs du lac l’Achigan et l’équipe nationale, ses laboratoires d’essai
Pierre Beaudin n’a pas été bien loin pour expérimenter ses nouveaux matériaux. Par l’entremise de son ami Sicotte, entrepreneur grutier montréalais et vacancier au lac l’Achigan, il est mis en contact avec George Athans, vedette montante de l’Équipe nationale canadienne de ski nautique (1966 à 1974). Sea Gliders devient le commanditaire principal de l’équipe et offre son matériel pour l’expérimenter. L’équipe s’installe, alors pour l’été dans une auberge à proximité du chalet des Sicotte, au lac l’Achigan et offre quotidiennement aux vacanciers hippolytois et visiteurs leurs exploits : ceux de George Athans1, champion mondial combiné en 1971 et 1973, de son frère Greg, de Linda Bocock et leur entraîneur Rob Bocock. Cette association de la compagnie Sea Gliders et de l’Équipe nationale canadienne durera 10 ans.
1 George Athans : A battu 28 records canadiens et remporté 10 titres nationaux. Élu au Temple canadien de la Renommée olympique, en 1971 et sportive, en 1974. Il a reçu l’Ordre du Canada 1974.