Eh oui, vous avez bien lu. J’ai choisi ce titre suite à une prise de conscience spontanée du temps qui passe, le jour de mes 80 ans. Mes amis ont beau me dire « toi au moins, tu t’es rendu là, nous, on n’est pas certain de pouvoir atteindre cet âge vénérable ». Ces propos, toutefois, ne m’apportent aucun réconfort.
Mes vingt ans se sont multipliés par quatre
Mes capacités se sont divisées par quatre
Physiquement, mon bateau prend l’eau
Moralement, j’arrive à vaincre le cahot
Doté d’une bonne mémoire
J’ai toujours conté beaucoup d’histoires
Aujourd’hui, je compte mes pilules du soir
Logées au fond de mon tiroir
Pour parler du vieillissement
Le vocabulaire est abondant
On vante les vertus de l’âge d’or
Plutôt que d’une jeunesse qui a pris l’bord
Quand on parle des vieux
Les mots sont élogieux
On a recours aux euphémismes
Pour éluder le réalisme
On se doit d’adoucir
Nos perspectives d’avenir
Dans le même ordre d’idées
Il faut bien l’avouer
On ne voudrait surtout pas nicher
Au fond d’un CHSLD
Les souvenirs d’antan sont omniprésents
Tout à l’époque était enlevant
L’avenir était devant nous
On ne pensait pas au manger mou
On parlait peu des virus
On s’en tenait à l’herbe à puces
Je pècherai donc par omission
Me limiterai à la confession
Mon Père, je m’accuse de…
Le passage à la confesse
Était souvent empreint de stress
Passe encore pour avoir manqué la messe
Plus périlleux de parler de fesses
On choisissait le prêtre le moins sévère
On s’en tirait avec une p’tite prière
Pour les péchés commis mon père
À l’ombre d’un réverbère
Si vous trouvez que je suis sombre
Que sur l’âge d’or, je porte une ombre
N’allez pas croire que je suis nostalgique
Que c’est de la guenille que je chique
Les mots que j’ai soigneusement choisis
Sont à saveur de parodie
Si j’ai abusé d’la frime
C’est d’abord pour accommoder mes rimes