Photos de Marc Sigouin et de Lise et Alphonse Sylvain
En haut, Annette Lanciault, finissante de l’École supérieure de Sorel, 1931. Avec ses élèves de l’école de rang no.6, jour de la 1e communion de Lise Morin, 1947. En bas, 1963, enseignante et responsable de l’école Notre-Dame-du-Rosaire, au village de Saint-Hippolyte.
Annette Lanciault, 22 ans à l’école du rang des Sigouin -Partie 3
(Mme Paul-Émile Sigouin)
Parmi les nombreuses maîtresses d’école qui se sont succédé durant plus de 90 ans dans nos écoles de rang (1), l’aventure d’Annette Lanciault (Mme Paul-Émile Sigouin), enseignante de 1941 à 1965, a été marquante.
Durant 22 ans, à l’école du rang des Sigouin, elle a été au premier rang des changements éducatifs, sociaux et économiques de ce coin de notre municipalité. Cette mini société du rang a été transformée par les attentes nouvelles du modernisme réclamé par les nombreux touristes qui s’y sont installés dans les années 1940 à 1970.
Vie de couventine
«La vie d’une enseignante d’une école de rang était semblable à celle d’une couventine, nous dit Thérèse Racine, Hippolytoise qui a fait son primaire à l’école du lac Connelly, avec madame Sigouin. Elle m’a bien préparée à devenir pensionnaire au couvent de Saint-Lin et de Longueuil pour obtenir mon diplôme et pourvoir enseigné à l’école du rang au lac l’Achigan. » À cette époque, l’institutrice avait besoin d’un certificat de bonne conduite de la part du curé pour montrer qu’elle avait une moralité publique irréprochable (2) et, lorsque c’était possible, un Certificat d’étude supérieure (9e année). Souvent guère plus âgée que ses élèves, entre 16 et 20 ans et célibataire, les convenances exigeaient «qu’elle soit obéissante aux directives, rigide en discipline et «connaissante» dans toutes les matières au programme.2 Seule, elle avait la lourde tâche d’enseigner à des élèves de 5 à 14 ans, tous réunis dans une même classe en 3 ou 4 divisions. Si la Commission scolaire assure son gîte dans un petit logement annexe à l’école, elle doit s’y confiner et s’abstenir de tout contact et relations qui pourraient nuire à sa réputation. (2) À la merci des rumeurs et des résultats des élèves, son salaire annuel, à l’exemple de celui de Rachel Bernard, à l’école no. 5, en 1931, est de 275$. Salaire, dit important, car on lui accorde un bonus de 50 $ pour enseigner à 45 élèves.(3)
S’impliquer au-delà de l’école
« Madame Sigouin a été plus qu’une simple maîtresse d’école, se souviennent Lise Morin et Alphonse Sylvain qui ont été ses élèves durant les années 1941 à 1954. Elle connaissait nos familles et leur offrait son maximum d’accompagnement. Elle faisait preuve de patience et d’une volonté éducative tout en intervenant avec un gant de velours ». Les enfants des familles Sigouin, St-Onge, Villeneuve, Veilleux, Taillefer, Lanois et d’autres du rang, à qui elle a enseigné en témoigneraient tout autant. « Pourtant, ce n’était pas facile tous les jours!, lance en riant, Alphonse Sylvain. Moi, comme d’autres, on aimait rire et jouer des tours, mais à l’école, il y avait un rituel à respecter. Avec madame Sigouin, tout se passait bien. Chaque matin, debout, on récitait nos prières, puis, venaient les récitations individuelles des leçons près de son bureau ». « Pas facile quand on ne les a pas apprises, la veille », glisse en se moquant, Lise Morin, sa conjointe. « Ensuite, on écoutait en silence les leçons de grammaire, d’arithmétique et les tables qu’on recopiait dans nos cahiers pour les apprendre, chaque soir. Les leçons d’histoire et de géographie étaient très appréciées. Madame Sigouin était une vraie encyclopédie. Elle nous faisait voyager, à travers des connaissances si captivantes que le temps passait vite ! »
L’école de rang ferme, un nouveau monde s’ouvre
« Lorsque l’école du rang a fermé, en 1962, dit son fils Marc Sigouin, sa vie s’est transformée. Enseigner dans un rang, c’était faire partie de la vie des familles de ses élèves. Elle dînait souvent avec eux et n’avait qu’à traverser la rue pour aller chercher ce dont elle avait besoin. Elle participait et était invitée à tous les événements familiaux. À l’école du Village, c’était plus impersonnel. Pourtant, ma mère positive s’est adaptée. Elle était à l’inauguration de la nouvelle école Notre-Dame-du-Rosaire, au village comme enseignante et en fut même une responsable appréciée! À la fête de sa retraite, en 1965, j’ai eu l’honneur de lui lire une adresse. Encore, aujourd’hui, j’en ressens toute l’émotion vécue! »
1 Voir ci-dessous la liste des institutrices et instituteurs ruraux de Saint-Hippolyte à compléter. Merci
2 Loi sur l’Instruction publique.
3 Suzanne Laurin-Varin, Cahiers d’histoire de la Rivière-du-Nord, vol 1 no.2, Août 1983
4 Thérèse Racine a été enseignante à l’école de rang du lac de l’Achigan, de 1952 à 1957.
Construite obligatoirement selon les plans fournis par le département de l’Instruction publique,
L’école de rang, no. 6 du lac Connelly est construite en bois peint en gris. Elle est éclairée de plusieurs fenêtres selon 1) une orientation précise au sud-ouest pour favoriser l’éclairage naturel et la chaleur en hiver. 2) La classe unique contient 3) le bureau et la chaise de l’institutrice installés sur une tribune à côté 4) d’un tableau noir qui couvrait une partie d’un mur opposé aux fenêtres. Dans le local unique de classe, 5-6-7) des rangées de pupitres à deux places étaient vissés au plancher. Le local était muni 8) d’un poêle en fonte qui réchauffait le local durant l’hiver et servait à la cuisson des aliments des élèves pour le repas du midi. 9) Un petit escalier menait au grenier qui servait pour ranger et sécher les vêtements, en hiver. 10) Le logement comprend un lit, une table, une armoire et 11) un petit poêle à la disposition de l’enseignante. 12) Un hangar à bois, dit «shed à bois» est alimenté, tous les jours par des élèves désignés, dans 14) le bois de chauffage donné par les parents. 13) Une latrine ou «bécosse» sèche, entretenue par la maîtresse, était attenante à l’école.
Liste des institutrices et instituteurs ruraux dans les écoles de rang
de la municipalité de Saint-Hippolyte entre 1871 et 1962
Mise à jour, 15 avril 2018