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L’économie des villages isolés d’autrefois : ancêtre du jeu de Monopoly ?

Au cours de cette période difficile des années 1860–1920, comme dans tous ces petits villages naissants et isolés du Québec, qu’ils soient des Laurentides, de la Mauricie, de l’Outaouais ou des Cantons de l’Est, la vie économique du village ressemblait jusqu’à un certain point à une partie de Monopoly, et ce, à cause du nombre restreint d’hommes d’affaires importants dans ce village.

 

Tu dois alors choisir de vivre de la colonisation, à moins de t’expatrier aux États et de te noyer dans la culture américaine des filatures de la Nouvelle-Angleterre. Vivre dans la colonisation, ça veut d’abord dire vivre dans l’autarcie, d’acheter le moins possible, de tout faire toi-même. La femme du colon tisse la laine avec laquelle elle fait tous les vêtements de la famille. On tue le cochon pour faire notre propre viande, à tour de rôle avec le voisin, étant donné que l’on ne peut pas conserver la viande longtemps. On cultive un grand jardin. La chasse et la pêche ne sont pas des sports, mais une nécessité. On chauffe au bois. Mais, il demeure toujours qu’il y a des choses à acheter au village; la voilà la partie de Monopoly.

 

Au village, il y a des activités commerciales importantes, mais peu nombreuses. Celui qui arrivera à en contrôler quelques-unes finira possiblement par les posséder presque toutes avec le temps. Elle est là, la partie de Monopoly. De ces entreprises, un peu par ordre d’importance, il y a bien sûr le magasin général. Qui ne doit pas un peu d’argent au marchand général, surtout avec tous ces enfants à élever ? Puis, il y a la scierie, le « moulin à scie » comme on l’appelle, pourvoyeur d’emplois, surtout pour les chantiers de bûcherons pendant l’hiver et pendant le flottage du bois au printemps, la drave.

 

Déjà, on devine la puissance de celui qui possèderait par exemple et la scierie et le magasin général. Il finance et donne l’emploi à la plupart des colons. Tu t’entends avec lui ou tu t’expatries en cédant tous tes biens pour une bouchée de pain. Facile ensuite pour lui d’accéder à la mairie.

 

Viennent ensuite la boutique de forge et l’hôtel, cet hôtel qui est le cœur du village et de la vie sociale. Suivent les emplois qui sont sujets à dépendre de l’influence politique du maire et des biens nantis comme le maître de poste, l’agent des terres, le maître d’école. Pour les professionnels, comme ils sont rares, on leur porte plutôt très attention; notamment en ce qui concerne le médecin (on dit « le docteur »), le notaire. Quant au curé, s’il est ainsi exilé dans cette paroisse pauvre et isolée, il peut s’agir d’un prêtre en punition ou d’un débutant, mais son influence est grande et il s’avère souvent un bon protecteur.

 

Enfin, le développement du réseau routier et surtout l’arrivée du chemin de fer allaient te permettre de travailler à l’extérieur et surtout de vendre tes produits et d’acheter à l’extérieur. Déjà en 1880, on remplaçait le cheval qui transportait 800 à 1,000 livres à cinq milles à l’heure par un train de 5 à 7,000 tonnes qui filait à soixante milles à l’heure. Le colon de Sainte-Adèle pouvait même vendre son lait à Montréal! Finie la partie de Monopoly!

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