Vernant, Jean-Pierre, L’univers, les dieux, les hommes, Points, Seuil, 1999, 245 pages.
Quels sont les mythes qui meublent votre imaginaire ? D’où viennent les personnages fantastiques qui apparaissent dans vos rêves ? Sur quoi se basent vos peurs ?
Jean-Pierre Vernant (1914-2007) a enseigné la pensée grecque au Collège de France durant toute sa vie. Il est un spécialiste de haut niveau qui a écrit de nombreux livres et articles pour des experts. Dans l’avant-propos de son livre, il raconte que chaque soir, lorsqu’il gardait son petit-fils, ce dernier lui demandait de lui raconter une histoire avant de dormir. C’est ainsi qu’il rédigea un beau livre facile à lire et à comprendre pour expliquer le monde surnaturel des Grecs, qui comptait environ 200 dieux et 2000 demi-dieux.
Imaginez un peu, Zeus, le dieu des dieux, se déguisant en humain pour venir sur terre séduire une belle jeune fille à l’occasion d’une bacchanale. La jeune fille revient chez elle au petit matin et dit à sa mère : Maman, j’ai fêté avec dieu.
En lisant ses histoires, vous découvrirez le contexte historique et social dans lequel sont apparus Europe, Pandora, les personnages de l’Iliade et de l’Odyssée d’Homère : Ulysse, Achille, Œdipe, la Sphinge, l’Oracle de Delphes, Dionysos, les dieux qui punissent avec un déluge (avant celui de la bible). Un dieu personnifie la nuit, un autre la faim, le mal, le mensonge, etc., et tous les sentiments, le royaume des morts, l’Hadès, le sens de l’univers, le cosmos, etc. Les dieux grecs sont très jojo. Ils descendaient régulièrement sur terre pour participer aux bacchanales avec des humains. Le contraire d’Abraham prêt à sacrifier son fils à son dieu.
Évidemment, pour comprendre, il faut se débarrasser d’un préjugé fort répandu, celui de notre supériorité technologique. Personnellement, après avoir beaucoup étudié la civilisation gréco-romaine, je considère qu’ils étaient supérieurs à nous à plusieurs niveaux, surtout dans le domaine des relations humaines et de la connaissance de la nature humaine. Je donne un seul exemple. Les Romains construisaient des villes dans le sud de la France en l’an 100, avec un plan d’urbanisme, un système d’aqueduc et d’égouts, etc. 2000 ans plus tard, plus de 80 % des citoyens de Chine, d’Inde ou d’Haïti ne sont pas desservis par ces services.
Un autre avantage de parler de ces mythes aux petits enfants réside dans le fait que pour les Grecs le bonheur est dans ce monde et qu’il faut satisfaire les plaisirs du corps, comme le démontre Michel Onfray dans son Traité d’athéologie. C’est tout le contraire des religions qui placent le bonheur après la mort du corps.
