Pour le bébé, le très jeune enfant, ce pronom n’existe pas vraiment. Il l’acquerra beaucoup plus tard.

 

Le JE pour lui, c’est le sein de sa mère, les bras de ses parents et de ses frères et sœurs, les câlins qu’on lui donnera. Il ne fait pas encore la différence entre le JE et le NOUS. Peu à peu, il prendra conscience qu’il y a les autres. Il se reconnaîtra comme une identité indépendante, mais cela se fera tout doucement! Et le JE grandira en lui, il se percevra comme séparé des autres, se reconnaîtra dans un miroir, prendra en charge ce qu’il est, assumera sa personnalité différente de celle de son entourage.

 

C’est, je crois, à l’adolescence que son JE prendra toute sa force, qu’il assumera même au prix de conflits que cela pourrait engendrer. Puis, soudain, il rencontrera le NOUS. Il découvrira qu’il n’est plus le seul important, que son JE est étroitement enlacé à autrui, qu’il ne peut vivre sans que ce pronom perde de son importance et qu’il est juste et surtout gratifiant que son identité se mêle à autrui, devienne un nous!

 

Nous ne pouvons nous confiner à notre seul être. C’est peut-être la meilleure leçon que nous apprenons dans cette période difficile que nous traversons. Le JE, s’il peut vivre seul a besoin des autres pour mieux vivre, pour alimenter ce qu’il est. C’est en côtoyant, en aimant ceux qui l’entourent, en voulant, soudain aider ceux qui ont besoin de lui que ce JE deviendra vraiment un véritable JE.

 

Ce pronom s’ouvrira à la vie, à tout ce qui fait son monde, notre monde. Il accueillera les autres dans son JE, et c’est ainsi que son monde se remplira des richesses de l’amitié, de l’amour, de l’entraide. En fait, le JE ne peut exister seul, même si souvent, il a besoin de solitude pour se régénérer. Pour survivre, il a besoin du NOUS, et ce, même s’il se prétend introverti ou solitaire. Ce pronom se nourrit d’autrui, de la vie, de la nature qui l’entoure, sinon il s’atrophie, ne devient plus qu’un nombril qui se regarde. Voilà pourquoi je ne suis pas d’accord avec cette phrase de Sartre : L’Enfer, c’est les autres.