Il y a le temps, mais il y a aussi le moment. Ce dernier est impossible à retenir. Il est beaucoup trop fugace. C’est à peine si nous le voyons passer. Il s’avère ainsi incontrôlable. Qui peut diriger le moment ? Il arrive et s’est déjà envolé. Heureux, il a le vol rapide du colibri. Lent, il a celui de la corneille qui plane au gré des vents.
Il est intéressant de constater que le mot temps dérive de la racine grecque tempus qui fait référence à une division du flot du temps et avait ainsi le sens de couper, découper. Il a en son sein ce que nous nommons instant et moment. L’un étant plus rapide que l’autre. Tous les deux ne demeurent jamais en place, ils sont encore plus fuyants qu’une étoile filante. Ils disparaissent immédiatement pour laisser place à un autre instant, à un autre moment. Il est plus rapide qu’un clin d’oeil et peut pourtant posséder le pouvoir de rester en nous pour toujours comme inscrits au sein de nos souvenirs, de nos émotions, de notre sensibilité.
Il y a des moments marquants qui se gravent en nous comme les hiéroglyphes dessinés sur les murs des cavernes. Ne sommes-nous pas parfois tatoués à vie par certains d’entre eux ? Ils ne sont pourtant que de minuscules atomes du temps. Un ami physicien, disparu dans un autre temps, m’a un jour expliqué qu’un des grands problèmes de cette science est la question du temps. Même les physiciens sont incapables de le comprendre, de l’expliquer, de se l’approprier. Est-il une partie de l’univers, de notre univers ? Alors, pauvres néophytes que nous sommes, allons donc tenter de comprendre ce qu’est le moment !