L’ancolie tutoie souvent les fougères. Ce sont de grandes amies qui aiment naître et grandir l’une auprès de l’autre. La fleur aime donner de sa couleur aux fougères alors que cette dernière lui offre la fluidité de son ombre. Chacune aime prendre soin l’une de l’autre.
Fleur d’une discrétion, et même d’une timidité exceptionnelle, elle n’offre sa beauté que si, très délicatement, on la soulève et la retourne des bouts de nos doigts pour avoir le privilège d’admirer sa délicatesse et sa perfection. L’ancolie ne regarde pas le ciel, mais la terre d’où elle est issue.
Avec ses cinq pétales, certains l’associent à la main de la vierge Marie.
D’autres la relient pourtant à la tristesse ou à la solitude. Étrangement, quelques-uns lui accordent le pouvoir de guérir de l’avarice. Peut-être parce qu’elle est une fleur indigène, vivace, discrète un peu comme la chambre secrète de Séraphin, notre avaricieux national. Relever ses pétales, c’est peut-être comme ouvrir la porte fermée de Séraphin.
Pour moi, sa beauté se fait poésie. Il faut s’y attarder, y contempler une beauté qui ne s’offre pas aux « trop rapides ». Admirer ses pétales, c’est comme s’attarder aux mots pour y découvrir toutes les richesses qu’ils englobent. La poésie demande un effort d’attention, une ouverture d’âme. L’ancolie aussi.
Elle se fait aussi de beaux complices. Ces cinq éperons sont l’endroit où les papillons et les colibris vont se nourrir de son nectar. Elle nous offre aussi une longue floraison ce qui nous permet de les admirer et même de s’attendrir pendant quelques semaines de leur simplicité pourtant tout en splendeur.
Elle est apparue un printemps dans mon jardin sans préavis et se multiplie aussi légèrement que la douceur et la tendresse qu’elle m’inspire.