Intitulée 54 soleils, l’exposition d’estampes numériques du dessinateur Gonza Meza tiendra l’affiche à la bibliothèque jusqu’au 19 décembre 2019.
Le point de départ de cette série de dessins est un film d’horreur des années soixante, un de ces films kitsch, tellement mauvais qu’il en est presque devenu un film culte. Gonza Meza s’est intéressé à l’atmosphère qui s’en dégageait. Des scènes, des lieux, des personnages ont capté son oeil d’artiste. L’inspiration a surgi. Des images teintées d’émotion se sont bousculées dans son imaginaire. Les prémices de la série 54 soleils étaient posées.
54 soleils
L’exposition propose 54 dessins d’un noir impassible qui, tous, ne renferment qu’une seule note de couleur : un disque rouge. Ces soleils que l’on retrouve sur toutes les estampes représentent un élément chaud et excentrique. L’artiste a eu envie d’allier l’apparente neutralité du noir avec la frénésie du rouge. De l’eau de mer, des espaces de désert servent aussi de fils conducteurs. Certaines compositions présentent d’immenses étendues presque vides. On reconnaît là l’influence du dessinateur français Jean Giraud, alias Moebius, qui se plaisait souvent à déposer ses personnages sur une surface plane et uniforme.
Inspiration
Gonza Meza s’est laissé guider par ce qu’il appelle une « locomotive d’idées ». Les formes se sont révélées d’elles-mêmes au bout de ses doigts. « C’est comme ça que j’aime dessiner. Ça vient tout seul quand je suis réceptif. Ce n’est qu’après coup que l’esthétique et la logique émergent. C’est une manière de faire qui donne le goût d’aller plus loin », explique-t-il. C’est d’ailleurs en suivant cette approche qu’il a vu son langage artistique acquérir une plus grande maturité.
Style
Gonza Meza aime explorer. Il ne fait pas de choix intellectuel délibéré quant au style à adopter. Il laisse parler son inconscient. Il ne lui reste ensuite qu’à constater que ses créations sont fréquemment marquées de surréalisme et de symbolisme. Même s’il ne propose pas d’histoire séquentielle, sa façon de procéder s’apparente à celle de la bande dessinée européenne. « Des dessins qui ne cherchent pas à être réalistes. Ils peuvent déformer et sublimer la réalité pour atteindre une plus grande intensité, à l’image de ce qu’on retrouve dans la peinture expressionniste », explique l’artiste.
Sens
L’artiste ne cherche pas à transmettre des messages ni à signaler ses intentions ou orienter les perceptions. Il se laisse simplement habiter. Et il invite le spectateur à en faire autant. Certains dessins sont dépouillés, d’autres chargés de lignes et de traits. Des êtres fantasmagoriques parfois monstrueux, des visages figés, des silhouettes à peine esquissées fréquentent ses compositions. De quoi susciter des émotions extrêmes et libératrices chez le spectateur. Aristote aurait parlé de catharsis !
Technique
Les dessins présentés ont été créés au crayon graphite et à l’encre, il y a près de deux ans. Aux fins de cette exposition, ils ont été transférés à l’ordinateur. Gonza Meza les a un peu retravaillés. Il a renoirci numériquement les zones que la transposition avait affaiblies, car ses dessins requéraient un noir très noir pour mieux se rapprocher du langage de la BD. Il a apporté des retouches mineures. Et il a un peu « nettoyé » ses dessins. Juste un peu. Il ne voulait pas en faire des dessins lisses et parfaits, « 100 % propres ». Il voulait conserver l’aspect organique, le langage spécifique du travail à la main.
Estampe numérique
Il y a de nombreux débats autour de l’utilisation de l’appellation estampe numérique. Les procédés d’estampe relevaient traditionnellement d’une compétence manuelle. Pour certains, une image produite à l’ordinateur n’est pas une création authentique. Elle ne devrait donc pas s’arroger le titre d’estampe. Dans l’oeuvre de Gonza Meza, aucune ambiguïté. Le numérique ne joue le rôle que de support de diffusion. Les dessins d’origine faits main existent bel et bien et l’artiste met un point d’honneur à respecter leur singularité.