L’histoire de ma municipalité de Saint-Hippolyte est singulière à plusieurs points de vue et mérite d’être reconnue1.
Jusqu’à ce jour, des recherches en cours et qui feront bientôt l’objet d’une publication nous ont amenés à nous pencher sur les pre-mières années d’existence du village. Nous croyons à ce jour, que cet endroit, avant 1864, n’est que montagne, bois et lac profond, sans occupation humaine.
Exploitant forestier
L’histoire nous apprend que Louis-Auguste Morin est un homme d’affaires, natif de Bellechasse et qu’officiellement selon le recensement de 1851, il habite les lots 6 et 7, du 9e rang d’Abercrombie 2, territoire au nord de la limite de celui de Saint-Hippolyte et faisant partie de celui de la paroisse de Sainte Adèle. D’ailleurs, cette dernière l’honore aujourd’hui à titre de fondateur pionnier. L’histoire nous apprend aussi que Louis- Auguste seconde son frère aîné, Augustin Norbert Morin, avocat et homme politique reconnu. Ensemble, les frères Morin administrent les lots 3 qu’ils possèdent dans les cantons d’Abercrombie et Morin, ce dernier nommé en l’honneur d’Augustin Norbert. Ils y favorisent la venue de colons, 30 ans avant le curé Labelle. Sur ces territoires, naîtront plusieurs villages dont celui de Sainte-Adèle nommé en l’honneur du prénom de la conjointe d’Augustin-Norbert, Adèle Raymond.
Village à naître pour lui aussi
Mais l’histoire nous montre aussi qu’en 1864, Louis-Auguste possède les lots 28 b et 29 a, b, c 4 du 11e rang du canton de Kilkenny. Actuellement nous cherchons à connaître quand il les a acquis, mais nous savons qu’il en offre 15 arpents à Mgr Bourget, évêque du grand diocèse de Montréal, pour y construire un lieu de culte.
Peut-on penser, cependant qu’à l’exemple de son frère, il trouve intérêt à donner un terrain de 15 arpents dont un promontoire avantageux pour la construction d’une chapelle pour y faire naître un village à l’exemple de son frère ? Cet endroit, n’est-il pas idéal pour la construction de la future chapelle qui, dominant un vaste espace d’eau (lac l’Abîme devenu Morency), sera porteur du son d’une cloche rappelant à tous les fidèles, la présence d’un lieu saint à cet endroit ?
C’est probablement aussi à cette conclusion que l’archidiacre Mgr Hippolyte Moreau, mandataire de Mgr Bourget, mentionne dans son rapport. Mgr Bourget, acceptant l’offre, résout deux situations. Il met fin à la querelle des paroissiens du lac des Quatorze-Îles, plus au sud sur l‘emplacement d’un lieu de culte. Il offre un lieu plus central afin de regrouper tous les baptisés catholiques romains de langue française sur ce vaste territoire que présente la municipalité d’Abercrombie, partie est..
Village à bâtir
Nous avons dit en préambule que l’histoire de Saint-Hippolyte est singulière. Voilà, à ce titre un exemple concret, contrairement au récit habituel de la naissance d’un village, où il est question de confluents de cours d’eau se rencontrant ou de lacs devenant point d’arrêt. On y installe un campement qui se prête à des échanges et à la traite avec les Premières Nations. D’autres villages ont pris naissance au pied d’une chute d’eau créant un portage obligatoire, chute d’eau devenant barrage où se crée une petite industrie de bois puis, une plus grosse et même plusieurs autres qui nécessitent des travailleurs qui habitent aux alentours. Pourtant, aucune de ces raisons n’existe pour l’emplacement et la naissance du futur village de Saint-Hippolyte !
Empressement à construire la chapelle
On peut alors comprendre l’empressement qu’a manifesté Louis-Auguste Morin pour bâtir de ses mains malhabiles d’homme d’affaires, le premier lieu de culte. L’histoire nous apprend que ce bâtiment, trop près de la falaise du promontoire pour laisser entendre le tintement de la cloche, n’est pas assez solide pour accueillir plusieurs personnes. Il n’a donc jamais été utilisé pour y célébrer un office religieux, les paroissiens refusant d’y entrer. Il faudra attendre le printemps 1868 pour que les syndics élus qui excluent Louis- Auguste Morin démolissent le bâtiment et organisent des corvées communautaires (bis) pour construire, sur un terrain plat et plus loin de la falaise, une chapelle plus solide.
Chapelle sans villageois
Si on suppose que Louis-Auguste Morin, à l’instar de son frère, voulait y faire naître un village, quatre ans plus tard il ne semble y avoir qu’une chapelle, sans aucun villageois habitant autour. Comme l’environnement de ce lieu est relativement accidenté sur une assez bonne distance, à ce jour il nous apparaît que si quelques lots des rangs voisins sont occupés, ils sont loin du village. Nos futures recherches ou peut-être des souvenirs partagés par des ancêtres de nos lecteurs, nous permettront, nous le souhaitons, en connaître davantage. Histoire à suivre…
1 Quoi qu’en pensent des administrateurs et archivistes!
2 La municipalité de Sainte-Adèle lui reconnaît avec sa conjointe Élisa Blais et leurs enfants, le titre de famille pionnière fondatrice. Celui-ci a secondé dans le commerce d’exploitation forestière, son frère Augustin-Norbert Morin fondateur de Sainte-Adèle, village qui porte le prénom de sa femme Adèle Raymond. Il y a assumé les tâches d’écuyer (équivalent de représentant de la Couronne britannique), capitaine de milice (shérif) et marguillier.
3 Jean-Hector Leclaire, arpenteur-géomètre, Carte d’arpentage de la municipalité de la paroisse de Saint-Hippolyte, 1886.