Valérie le cherche… le bonheur
Pétillante! Voilà la vraie nature de Valérie, et ce, malgré les sons étranges qui sortent de sa bouche (syndrome de Gilles de la Tourette). Cette petite fille grandit bien et prend courageusement sa place.
Changement drastique
Toutefois, depuis la mi-septembre, drastiquement, Valérie ne parle plus. Elle refuse toute communication. À l’école, pas un mot. À la récréation, elle reste là, collée au mur de briques, figée à fixer le sol. Même à la maison Valérie est inatteignable. Clairement, ce silence est une vive réaction à un coup reçu.
Changement nécessaire
Nous sommes en novembre et Valérie ne parle toujours pas. « Faut que ça s’arrête », me disent les parents affolés. Pendant que les parents me décrivent la situation, Valérie est là à écouter passivement. Sans colère. Sans résistance.
- Valérie, je ne te forcerai pas à parler. Je ne te chicanerai pas et ne chercherai pas à connaître ton secret. Tu as sûrement une très très bonne raison pour ne plus avoir envie de parler. Tu es là avec tes parents et ça me suffit. Je considère ta présence ici comme un petit désir de comprendre ce qui t’arrive. Je vais tenir compte de ton besoin de distance et ma façon de travailler avec toi sera que moi, je vais te parler… et toi tu m’écouteras, comme tu le fais maintenant.
Valérie m’écoute sans répondre. J’ai parlé toute seule pendant quelques semaines. Je lui ai parlé de la quête intérieure des enfants, des blessures qui les bouleversent au point d’éteindre leurs désirs et leurs goûts. Je lui ai parlé des ingrédients que doit contenir la relation pour qu’elle goûte bon. Je lui ai enseigné les « voleurs d’espérance » comme le rejet, la confusion et le coincement qui parfois blessent tellement le cœur que la solution qu’ils trouvent à leur souffrance est de se figer… sans larmes, sans paroles.
Au fil de nos rencontres, je lui ai raconté les rêves que je faisais lorsque j’étais enfant… que ces rêves parlaient de mes joies, de mes peines et de mes moments de détresse que j’ai réussi à traverser. Je me faisais le devoir de lui parler de vécu, de valeurs, de tout ce qui colle à la réalité, bien loin des concepts ou des « il faut que » de ce monde : « il faut que tu parles…, c’est important de communiquer voyons…, il faut que tu fasses ceci, que tu fasses cela ». Mon but était que Valérie se sente accueillie et qu’elle retrouve le goût de s’exprimer.
Le miracle
Un jour, Valérie m’arrive avec un message différent dans l’œil. J’attends… elle me lance :
- Je veux te raconter mon rêve!
À mon tour d’être silencieuse.
- Je chante en italien. Y’a plein de monde. Je danse. Mon père joue de la musique…
Valérie n’en finit plus de me raconter tous les détails, les émotions et la présence des gens qu’elle aime dans son rêve. Elle passe plusieurs séances à me raconter ses rêves… très abondants, je dois dire. Le fil conducteur : tous les rêves de Valérie la mettaient en scène, devant public, à chanter, à danser, chaudement applaudie. Toujours en réussite.
Le chant qui cicatrise
J’ai donc suggéré aux parents de lui offrir, en cadeau, un professeur de chant. La chance voulue qu’elle tombe sur la choriste d’une chanteuse reconnue mondialement (je tais son nom, confidentialité oblige). Grâce à son talent et à sa détermination, Valérie a retrouvé sa vraie nature et sa capacité de bien prendre sa place. Oui, depuis elle parle, chante, et ce, en français, en anglais et en italien. Aucune trace du syndrome de Gilles de la Tourette pendant ses prestations et beaucoup moins dans ses conversations.
La blessure logée dans son silence à l’âge de 11 ans
Le brutal rejet de ses amis. L’abominable rejet. Celui qui blesse l’âme jusqu’à lui enlever le goût d’être. Comme l’explique si bien Alice Miller, psychanalyste célèbre pour ses recherches sur l’enfance, « Notre corps ne ment jamais. ». Valérie en est la preuve.