- Naissance
Je suis né le 16 mai 1958 à Ipamu, en République Démocratique du Congo, d’un père enseignant et d’une mère sage-femme. Je suis le deuxième d’une famille de deux enfants. Je rends grâce à Dieu pour tous ces proches retournés tous à la maison du Père.
- Études
J’ai passé la quasi-totalité de mes études au pays, études qui seront couronnées par un baccalauréat en philosophie et une licence en théologie. Après quelques années de carrière professionnelle, je m’envole, en février 1999, pour l’Université Catholique de Louvain où j’entreprends une thèse en théologie biblique sur « la figure de Jean-Baptiste dans le récit johannique ».
- Travail dans combien de paroisses
Il faut dire d’abord que mon engagement comme missionnaire dans le nouveau monde est un choix volontaire de ma part. Actuellement, du moins jusque fin juin, je travaille comme prêtre modérateur dans les paroisses de st-Hippolyte et de st-François-Xavier à Prévost. En plus de ces deux paroisses, je sers de collaborateur à la cathédrale de st-Jérôme. La cathédrale, je vous rappelle, c’est l’église de l’évêque. J’y célèbre notamment des funérailles et des mariages. Mais le point de concentration de ma contribution comme collaborateur de l’évêque demeure le cimetière de st-Jérôme dont je m’occupe avec un autre confrère. Je partage avec ce dernier des temps de prière lors des inhumations et des mises en niche.
- Vous habitez le presbytère de St-Hippolyte
Oui, j’habite le presbytère. Il y a trois ans, la Fabrique d’Église de st-Hippolyte avait accepté, sur ma proposition, de rénover l’appartement du premier étage pour y loger son pasteur. C’est un coin bien tranquille et séduisant pour de nombreux touristes qui fréquentent la région. Non seulement à cause de sa beauté naturelle mais aussi en raison de ses nombreux lacs.
- Les différences entre une messe en Afrique et ici
Concernant cette question, je dirai que la principale différence entre ces deux univers réside essentiellement au niveau culturel. Je me permets de relever ici quelques aspects spécifiques de la culture africaine d’où découle une manière particulière de célébrer. En Afrique, la vie c’est le sacré par excellence. Dans toute liturgie, on célèbre la vie. Et la vie, on la célèbre non pas dans la tristesse mais dans la joie. On la célèbre en chantant, en dansant, en battant le tambour. Le deuxième aspect que je vais souligner est le sens de l’accueil. En plus de réunir le monde pour la prière, la messe est aussi un lieu pour vivre chaleureusement l’accueil : à l’entrée comme à la sortie de la messe. Enfin, la culture africaine est une culture du communautarisme, c’est-à-dire une culture qui souligne tant l’apport communautaire, la cohésion sociale entre les membres. Cette cohésion s’exprime tout au long de la messe à travers des gestes posés à l’unisson et la participation de tous. C’est la communauté unie et solidaire qui célèbre son Dieu. Je me résume en disant que les messes en Afrique sont des messes plus vivantes : les assemblées sont bondées de monde, la prédication du prêtre est jalonnée de cris d’acclamation et élaborée avec l’apport de toute l’assemblée, la musique rythme la prière en réveillant efficacement tous les dormeurs et en mettant debout toute l’assemblée pour la danse qui remet le corps à l’unisson avec l’Esprit et tout le groupe ! Oui, la vie « explose » dans les célébrations africaines. Tout ce que je dis là ne veut pas dire qu’il manque d’accueil ou de vitalité dans les célébrations occidentales, mais c’est plus explosif, plus charismatique, plus expressif en Afrique qu’ici. Il faut bien souligner cette différence qui n’enlève en rien la qualité de la foi en Occident.
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Quelle est l’importance de l’église au niveau communautaire
L’église c’est d’abord le symbole fort d’appartenance communautaire. C’est le point de repère d’une communauté, sa référence, son identité. Je vais montrer cela par un exemple. Vous vous souvenez sans doute de cette année où on a voulu fermer plusieurs églises du diocèse. On a constaté que chaque communauté voulait défendre son église. Même les maires, même les conseillers municipaux, tout le monde était entré dans la danse avec l’idée de laisser ouverte leur église, de défendre leur patrimoine.
Une église est comme une maison familiale. Elle permet aux membres de la communauté de se rassembler pour prier, pour célébrer Jésus-Christ, pour vivre et développer leur foi. Elle est aussi un lieu de partage et de solidarité, un lieu pour fraterniser, s’entraider, se soutenir. Mais une église joue aussi un rôle de socialisation : C’est là, par exemple, que les mariages (civils et religieux) se célèbrent et que la reconnaissance sociale des époux se fait. C’est là aussi que l’être humain fait son cheminement humain et spirituel, qu’il apprend les valeurs qui feront de lui non seulement un bon chrétien mais aussi un bon citoyen. Je ne dis pas que ces valeurs manquent chez les autres, qu’on ne peut pas être un bon citoyen sans l’appartenance à une communauté ecclésiale mais seulement il manque une référence majeure, Jésus-Christ dont la parole imprime sur les individus un style de vie particulier, une manière d’être et de travailler. Si je peux dire encore une dernière chose : Une église joue aussi un rôle thérapeutique. Elle est un lieu de guérison. Qu’est-ce qui peut guérir un individu? La parole de Dieu, la prière personnelle ou communautaire, la chaleur humaine qu’une communauté fraternelle peut offrir, les conseils des autres, sans oublier le sacrement du pardon, qui est une véritable source de guérison, ainsi que celui des malades.
- La paroisse est chanceuse d’avoir des bénévoles comme Gilles Ducharme qui trouvent des fonds pour la réfection du toit de l’église et des vitraux
Je le dis toujours : Sans les bénévoles, pas de paroisse. Ce sont les bénévoles qui font vivre une paroisse. On ne peut donc pas envisager une paroisse sans leur présence, leur dévouement, ou encore la gratuité de leur amour et de leur engagement. Ils ne sont pas payés pour tout ce qu’ils font mais ils recevront, j’en suis sûr, comme dit Jésus, le centuple. Gilles en était un. La paroisse était un peu comme sa maison : il y passait tout son temps et lui consacrait toute sa vie. Il mettait au service de la paroisse tout son dynamisme, son talent, sa foi, son énergie, son temps, ses relations, son zèle diplomatique et, sans doute aussi, ses finances. C’est un exemple à suivre, un modèle à imiter.
- Quel est l’avenir de l’église ?
Je comprends bien tout ce que cache votre question. Ce n’est un secret pour personne que l’Église traverse actuellement une période de vache maigre, voire déroutante pour certains. Non seulement à cause de cette histoire triste des abus sexuels ou du passé colonial de l’Église, qui donne lieu aujourd’hui à la contestation, parfois à la destruction massive et aveugle de l’Église, mais aussi à cause du matérialisme ambiant qui a conduit l’être humain à se détourner de son Dieu. Mais faut-il pour autant désespérer ou craindre le pire pour l’Église? Non, je ne pense pas. Dans toute histoire humaine, il y a toujours des hauts et des bas, des moments de crise et des moments de reconstruction. Je suis confiant qu’il y aura de nouvelles générations de croyants qui vont naître des cendres de l’Église et qui vont se mettre à rêver, sans doute avec raison, d’une nouvelle pentecôte, d’un nouveau souffle. Pour cela, il faut que l’Église arrive à panser ses plaies, puisse avoir le courage de faire sa propre autocritique ou autopsie. Oui, autant l’Église a ses forces, tout ce bien fou et inestimable qu’elle a fait depuis les origines jusqu’à présent mais qu’on ne reconnaît malheureusement pas toujours à sa juste valeur, autant elle a des faiblesses, des points sombres, ses péchés. Il faut qu’elle apprenne à faire son mea culpa. Un Vatican III serait, pour cela, le bienvenu. La démarche synodale initiée par le pape François en a posé les bases nécessaires. Non, je suis confiant. Je crois en l’avenir.
Abbé Godefroid Munima Mashie