Dans le domaine de la philosophie, il est rare de trouver un roman qui est écrit simplement, qui nous apprend des connaissances utiles sans avoir à relire trois fois chaque phrase. Le Madame Socrate de Messadié est l’un de ces livres. Il situe les philosophes comme Socrate et Protagoras, les politiciens comme Périclès et Alcibiade et les hommes de théâtre comme Sophocle dans le contexte de leur vie quotidienne. Et il ajoute un meurtre que Madame Socrate résoudra par l’application de la méthode de raisonnement de son mari.
Un bon roman policier philosophique, agréable et instructif
L’auteur situe l’action de son roman à l’époque du Miracle grec. Plus précisément, au Ve siècle, dans une Athènes au faîte de sa puissance, à une période que les historiens ont nommé Le siècle de Périclès. L’action se déroule avec l’Acropole d’Athènes, comme arrière-plan, « c’est là que bat le cœur de la pensée occidentale ». Il situe ce roman dans cette époque. Nous apprenons beaucoup sur la vie des habitants d’Athènes, alors la métropole de la Grèce et un des endroits au monde le plus avancé sur la nourriture, les fêtes, les dieux, les débauches, les nombreuses guerres, etc.
Le personnage principal du roman est Xanthippe, la femme de Socrate, qui est féministe et pacifiste. Elle dénonce l’esprit guerrier des hommes, recherche toujours la vérité, à un point tel, que souvent Socrate évite d’argumenter avec elle, et même il profite de son intuition, car « il faisait volontiers son profit des réflexions qu’elle laissait échapper ».
Le fait d’ajouter un meurtre, qui sera résolu grâce aux grandes facultés intellectuelles de Xanthippe, ajoute un élément palpitant. Socrate a peur d’elle et de ses questions, mais elle affirme qu’elle ne fait qu’utiliser sa méthode! Elle veut la vérité et que le coupable du meurtre soit jugé. Socrate fait passer les intérêts de ses amis avant ceux de la vérité. Puisque l’auteur présumé du meurtre est associé à Alcibiade, neveu de Périclès et que la guerre s’annonce, Socrate ne veut pas lui nuire et contribuer à affaiblir son autorité.
Il ne faut pas oublier deux personnages importants que l’on retrouve tout le long du roman : Demis et Taki qui se rencontrent chaque jour chez le Frisé, propriétaire d’une taverne. Ils boivent du vin et mangent des petits riens. Souvent Socrate les accompagne. Ils se racontent des histoires drôles et prennent la vie du bon côté. Ce sont des personnages ordinaires qui finalement, après quarante années de belles rencontres se rendent compte qu’ils sont heureux parce qu’ils ne sont pas morts. Ils n’ont pas voulu participer au pouvoir. Ils ne se sont pas battus pendant les guerres pour l’honneur. Ils n’ont pas voulu défendre de grandes idées philosophiques et risquer comme Socrate l’accusation d’impiété. « Nous n’avons jamais fait étalage de notre savoir ou d’aucune vertu. Le résultat est que nous pouvons encore faire la différence entre le goût du vin d’aujourd’hui et celui d’il y a quarante ans. » Ils s’enrichirent tout simplement pour être heureux. Ce sont des personnages ordinaires. Demis et Taki appliquèrent la même maxime sage : « Ne jamais faire envie, ne jamais attirer l’attention et toujours se garder de croire qu’on triomphe, dans quelque domaine que ce soit. » Demis représente l’américain easy going tandis que Socrate met en pratique le fameux learning the hard way.
C’est un roman très intéressant qui nous apprend sur la société dans laquelle vivait Socrate. Il n’y a pas de passages complexes. J’ai pris plaisir à lire et j’ai appris beaucoup sur la vie quotidienne au temps de Périclès et j’ai apprécié suivre les raisonnements de Xanthippe pour identifier l’assassin.