Marie-Ève Turgeon est une artiste hippolytoise. Elle est heureuse de pouvoir présenter une exposition de ses illustrations numériques dans la salle multifonctionnelle de la bibliothèque jusqu’au 19 novembre.
Il y a quelques années, Marie-Ève dessinait à l’encre de Chine. Puis, un jour, elle s’est procuré un iPad. Ce nouvel outil de travail lui a permis de réaliser son rêve : devenir dessinatrice et illustratrice professionnelle. « Mon succès est vraiment dû aux réseaux sociaux, sinon je ne ferais pas ce travail aujourd’hui. »
Le dessin numérique
Jardin secret est l’illustration qui a donné son nom à l’exposition. Pourquoi ? « parce que dans mes illustrations, il y a beaucoup de fleurs et que je traite de sujets qui me tiennent à cœur. C’est mon jardin à moi… qui n’est peut-être pas si secret! Je dessine sur mon iPad avec un crayon, explique-t-elle. Ça produit le même effet que dessiner à la main sur le papier. Au niveau de la technique, il n’y a pas de raccourcis. Mais ça me donne la possibilité de retoucher mes illustrations et donc, d’être plus efficace. »
Alors que ses dessins sur papier étaient en noir et blanc, le numérique lui a permis d’explorer les couleurs et de s’exprimer de façon plus éclatée bien qu’elle s’en tienne la plupart du temps à des palettes semblables. Elle affectionne particulièrement le rose. Il l’accompagne de dessin en dessin. Bien qu’elle ait déserté l’encre au profit du numérique, elle reste fidèle à ses thèmes de prédilection : la nature et les fleurs, la famille et les enfants. Avec la tablette, elle peut dessiner partout, même le soir, dans son lit. Elle l’apporte aussi dans ses déplacements. « Dès que j’ai un petit deux minutes et que j’ai envie de dessiner, je peux le sortir très vite. Ça facilite la spontanéité. »
Carrière professionnelle
Le jour je travaille en dessinant
Sa carrière professionnelle a le vent dans les voiles. Dans la dernière année, elle a fait l’illustration de la page couverture du roman de Mélissa Perron Au gré des Perséides. Elle collabore avec plusieurs revues dont elle illustre les articles. Elle a aussi illustré trois livres d’enfants dans les douze derniers mois. Elle nous invite d’ailleurs à la suivre dans ses nouveaux projets. Emballée, elle annonce déjà qu’elle travaillera, le printemps prochain, sur un nouvel album jeunesse « C’est le genre de livre que je veux illustrer depuis longtemps. Et l’auteur est quelqu’un que j’admire beaucoup. »
Elle propose à la vente des dessins sur le site Sur ton Mur aux côtés de beaucoup d’autres illustrateurs québécois. « Le dessin numérique imprimé est une nouvelle façon d’avoir de l’art québécois sur nos murs. C’est un art qui devient accessible à presque toutes les bourses. » Approchée par une compagnie québécoise, elle crée aussi, avec le style qui lui est propre, des tapisseries murales de papier peint autocollantes. On peut retrouver sa collection sur le site de Décor imprimé.
Le plaisir de relever des défis
Le soir, je me repose en dessinant
Marie-Ève adore relever les défis qui passent sur les réseaux sociaux. Ça la stimule. L’un d’eux consistait à reprendre la toile d’un artiste connu. Elle s’est amusée à y participer. Résultat : le dessin intitulé Hommage à Klimt. Elle a aussi relevé une autre gageure proposée sur le site de Facetober. On retrouve plusieurs de ces illustrations dans son exposition. Elle a également répondu à l’appel de Tire le coyote. Au printemps dernier, il a invité des artistes à créer des affiches pour faire la promotion de son nouveau spectacle. Celle de Marie-Ève en fait partie.
Illustrations porteuses
Ses illustrations sont douces, « féminines », précise-t-elle. Mais elles sont bien souvent, aussi, porteuses de sujets qui la touchent comme celle, largement diffusée, qu’elle a réalisée sur la violence conjugale. Si une de ses illustrations est adoptée pour faire connaître ou défendre une cause sociale, elle n’hésite pas à en autoriser l’utilisation.
Lorsqu’un événement de l’actualité vient la chercher, Marie-Ève dessine sur le coup de l’émotion. Le meilleur exemple en est l’illustration de Joyce Echaguan. Les circonstances qui ont entouré sa mort l’ont tellement outrée qu’elle a voulu poser un geste pour honorer sa mémoire. Le soir même de son décès, elle a fait son portrait. Sans se douter de l’ampleur symbolique que prendrait cette image. Des dizaines de milliers de vues sur les réseaux sociaux et encore plus de partages. Son dessin d’origine a été modifié de différentes façons et Marie-Ève s’en est très bien accommodé « J’ai offert le portrait à la famille de Joyce, il ne m’appartenait plus, commente-t-elle. La communauté autochtone l’a utilisé sur des pancartes, des chandails, etc. Les adaptations ont été faites pour la rendre plus coup-de-poing, pour que le message soit encore plus fort. »
Il faut d’abord y croire
Marie-Ève raconte que lorsqu’elle était petite, elle pensait que gagner sa vie en dessinant, c’était inaccessible. Ça ne pouvait être qu’un passe-temps. C’est pour ça qu’elle veut transmettre un message d’espoir aux enfants : « ce métier-là existe et ça se peut. Quand on travaille fort, qu’on crayonne beaucoup, beaucoup, beaucoup de dessins, on peut devenir un artiste et on peut vivre de son art ».