La Jérômienne Céline Landry est sculpteure d’argile. Elle exposera une sélection de ses œuvres, regroupées sous le titre Passages, dans la salle multifonctionnelle de la bibliothèque du 16 juin au 30 juillet. C’est pour la malléabilité de la matière qu’elle travaille l’argile. Contrairement à la sculpture par exemple de la pierre, qui se réalise par des retraits définitifs de roc, le modelage de l’argile, lui, permet d’ajouter de la glaise.
Exécution
La sculpteure façonne l’argile. Elle modèle des composants de base auxquels viennent se greffer des éléments complémentaires. Elle ne les assemble qu’après la cuisson. Elle sculpte avec ses mains et avec des objets hétéroclites dont elle détourne les fonctions. Ils deviennent alors des outils artisanaux. « J’utilise tout ce qui me permet d’obtenir le résultat que je veux. » Elle colore ensuite l’argile avec de la peinture ou de la teinture. À cette étape, précise-t-elle, « j’agis plus en peintre qu’en céramiste ». Ses sculptures se présentent sous différentes formes. Elle crée des assemblages d’une pièce, des mises en scène constituées de plusieurs éléments et des tableaux en trois dimensions. Elle y intègre souvent d’autres matériaux. « L’exécution reste la même, mais la planification est différente puisque je travaille avec des collaborateurs. » À titre d’exemple, elle cite La traversée (voir photo) : elle a confectionné l’enfant en argile, s’est adressée à un ébéniste pour la plateforme et à un autre spécialiste pour la découpe du plexiglas.
Démarche et intention
La démarche artistique de Céline Landry est très personnelle. Elle reflète son monde intérieur du moment. L’artiste attaque toute nouvelle œuvre avec une idée de départ qui, bien souvent, spécifie-t-elle, peut être une émotion. Dans cette exposition, elle traitera du thème des passages. Des moments importants comme le deuil, mais aussi des questions qui lui tiennent à cœur, comme l’illustre sa pièce La traversée. Elle lui a été inspirée par le vécu des enfants migrants. « Des enfants qui font face à des situations d’insécurité, de danger. Ils sont dans un passage vers quelque chose de très incertain. »
Céline Landry ne fait pas d’art conceptuel. Elle qualifie son travail d’art narratif. « Je me raconte une histoire. Prenez par exemple la pièce Nature en deuil : les arbres, les feuilles qui y pendent à l’automne, ça m’a donné l’idée de la mort. C’est comme si des feuilles se réunissaient pour saluer et célébrer le décès. » Il s’avère que ses œuvres sont, le plus souvent, des métaphores de la nature. On y retrouve d’ailleurs à plusieurs reprises le cypripède (sabot de la vierge) qui, pour elle, représente la nature féminine.
Dualité
« Il existe une dualité à l’intérieur de moi. J’ai quelquefois l’impression d’être deux personnes. J’ai un côté très obsessionnel et un côté plus libre. J’essaie de transmettre cette dualité dans mes créations. Je travaille sur des aspects qui peuvent paraître contradictoires. C’est ma façon d’affronter ma dualité pour, justement, l’apprivoiser, la réconcilier, pour être plus en équilibre. »
En intérieur, à l’intérieur
Céline Landry expose ses créations en intérieur. Évidemment, parce qu’elles sont fragiles, mais aussi parce qu’elles ont besoin d’un cadre, d’un lieu d’échange qui permet d’explorer la dimension d’intimité. « Je ne fais pas entrer n’importe qui dans mon intimité. Mais je suis capable, dans mes œuvres, d’aborder des sujets dont je ne parlerais pas. Elles me servent, en quelque sorte, d’interprètes d’intimité. Il faut leur accorder de l’attention pour en saisir toutes les couches. Elles ne se livrent pas d’un seul regard ni ne se donnent d’un seul élan. »