Dix nouvelles rafraichissantes, qui donnent le goût de vivre en ces temps de confinement. Dix petits textes qui nous présentent des Haïtiens et surtout des Haïtiennes heureuses. Ce roman démontre bien le vieil adage : les gens heureux n’ont pas d’histoire. L’auteur voit les femmes-jardins comme des déesses que l’homme place sur un piédestal pour les aimer, faire rire, les amuser, les respecter et tenter de satisfaire tous leurs besoins.
Nous n’entendons parler d’Haïti dans les médias que lorsqu’un journaliste peut trouver un scoop, une mauvaise nouvelle, un tremblement de terre ou un assassinat. Mais les dix millions d’Haïtiens connaissent aussi des moments de bonheur. Ces nouvelles nous font presque envier leur joie de vivre, leurs chants, la musique omniprésente, leurs relations humaines. Ils n’ont pas encore eu la chance de connaitre nos ingénieurs sociaux, les CHSLD, les CPE et autres. Les vieux et les enfants demeurent ensemble. C’est ce que j’ai constaté lors de mes huit voyages en Haïti pour un organisme communautaire qui construit des écoles.
Dans ce livre, tous les textes mélangent la nature, la mer, la nourriture fraiche et abondante, le climat convivial, la montagne, dans un pays pauvre il est vrai, mais riche de ses relations humaines. Le vaudou mélangé au christianisme, l’omniprésence des morts et leur retour la nuit ainsi que leurs bonnes ou mauvaises influences marquent l’imaginaire de l’auteur. La sexualité dominante est marquée par une grande sensualité sous le soleil des tropiques.
La première nouvelle, Alléluia pour une femme-jardin, nous présente la lune de miel entre une actrice haïtienne mondialement connue et un jeune haïtien de 15 ans. Pour un habitant du Québec, qui combat le froid 10 mois par année, cette nouvelle donne le goût de vivre. « Alors, avec les lèvres à demi ouvertes, je l’embrassai doucement, chaudement, aux yeux, aux oreilles, à la nuque, aux tempes, à la saignée des bras, au bout des doigts en mordillant ceux-ci, et de nouveau en pleine bouche. Pendant ce temps, mes mains ouvertes en forme de crabe apprivoisé n’arrêtaient par de travailler finement son ventre et ses flancs. »
La deuxième nouvelle, Roséna dans la montagne, nous présente un séminariste qui est en formation avec un prêtre irlandais, dans une paroisse en région. Il se lie d’amitié avec la bonne. Ils font l’amour et s’amusent beaucoup. Le prêtre est choqué et frustré – il observe en cachette la jeune femme dormir la nuit, nue – et il ne comprend pas que ce futur prêtre éprouve un sentiment de fierté pour sa sexualité, qu’il découvre qu’elle est une source de joie extrêmement bienfaisante pour son équilibre et sa santé et de plus, suscite une joyeuse confiance en soi. Le séminariste ne sent aucune culpabilité à prier Dieu dans la chapelle après avoir fait l’amour. Le prêtre lui demande « de rompre sans merci avec les excentricités païennes du vaudou et faire de la chasteté l’un des fondements de son destin ». Le jeune ne comprend pas. Il se demande pourquoi Dieu a créé la femme alors! Le prêtre l’envie, mais l’hypocrisie reprend le dessus. Il l’accuse du péché de fornication. Il est renvoyé.
Dans Mémoires de géolibertinage, l’auteur fait preuve de son immense culture générale – encore très valorisée chez l’élite haïtienne – en situant le libertinage dans les pays de la terre et dans notre histoire. Les autres textes sont à l’avenant. Enfin, un livre qui nous aide à aimer la vie, en ces temps de pandémie…